Montant de la Zakat El Fitr, une divergence entre les acteurs de l’islam en France
À l’approche de la fin du Ramadan 2024, la question du montant de la Zakat El Fitr suscite des débats au sein de la communauté musulmane en France. Traditionnellement, cette aumône obligatoire est destinée à purifier le jeûneur des erreurs et des fautes commises durant le mois sacré et à aider les plus démunis à célébrer la fête de l’Aïd el-Fitr dans la dignité. Cette année, le débat s’est intensifié avec des propositions de montant variant entre 7, 9 et même 15 euros par personne.
Le Conseil théologique musulman de France (CTMF) a été parmi les premiers à suggérer une réévaluation du montant de la Zakat El Fitr à 9 euros, invoquant les inflations annuelles dans le secteur alimentaire. Nous avions déjà évoqué ce sujet quelques semaines avant le Ramadan 2024 dans un article (Mise à jour du montant de la Zakât El Fitr et de la Fidyah pour le ramadan 2024). Le CTMF a expliqué cette revalorisation de la Zakat par l’augmentation du coût de la vie à cause de l’inflation mais également a pointé le fait que celle-ci n’avait pas changé depuis 2018.
Ses arguments ont été entendus par plusieurs organisations humanitaires de premier plan comme le Secours islamique France (SIF). Le Conseil français du culte musulman (CFCM) s’est aussi aligné sur cette recommandation. Il a indiqué, début avril, que la zakat al-fitr est désormais fixée à 9 € car le montant de 7 € en vigueur depuis longtemps devait évoluer compte tenu de l’augmentation importante des prix de l’alimentation ces dernières années.
Néanmoins, cette recommandation n’est pas universellement acceptée. La Grande Mosquée de Paris et d’autres organisations maintiennent le montant à 7 euros, arguant que le niveau de vie n’a pas significativement augmenté pour justifier cette hausse. Ils estiment également que cette augmentation peut représenter un défi économique pour certaines familles et que le donneur ne devrait pas se sentir trop désavantagé par cette décision.. Aligné sur cette justification, on trouve également Musulmans de France (ex-UOIF), le conseil des mosquées du Rhône (CMR), la Fédération française des associations islamiques d’Afrique, des Comores et des Antilles (FFAIACA) et Foi & Pratique.
Cette diversité des montants, loin d’être un simple débat financier, révèle une pluralité d’interprétations et de pratiques au sein de l’islam en France. Si l’augmentation à 9€ a déclenché de nombreuses interrogations des musulmans sur les réseaux sociaux, le CFCM souligne la légitimité des évaluations à 7€. Ces montants résultant de l’application de la règle religieuse qui prend en compte à la fois la situation de celui qui donne et celle du bénéficiaire, permet aux musulmans de faire leur propre choix dans cette diversité de propositions.
Il est important de retenir, que peu importe le choix qu’un musulman fera dans le don de la Zakat El Fitr, il ne doit pas insulter ou critiquer ceux qui ont fait un choix différent. Je rappelle aussi qu’il est possible de verser la Zakat en nourriture, si vous souhaitez adopter l’avis d’autres savants sur le sujet et connaissez un nécessiteux ou une association qui accepte de la recevoir ainsi.
De plus, si vous trouvez ce montant de 9€ trop important, dites vous qu’une partie de la communauté turque en France devrait verser un montant de 15€ cette année. En effet, la fédération DITIB a indiqué qu’elle passait le montant de 10€ (demandé les années précédentes) à 15€. Elle argue également que cette réévaluation correspond à l’augmentation du prix des denrées alimentaires.
Alors que la fin du Ramadan approche, il est essentiel de rappeler que l’essence de la Zakat El Fitr réside dans l’intention sincère de soutenir les plus démunis, quelle que soit la somme donnée. Les débats stériles sur le montant ou la manière de la verser (nourriture vs argent) ne doivent pas nous détourner des objectifs de cette Zakat. Le Ramadan doit venir renforcer les liens entre musulmans et non les désunir même s’ils divergent sur certains points.
